À la rencontre des personnages des noms de rues de Verteillac

Un peu d’histoire…

Mais qui sont-ils ?

Certains appartiennent à l’histoire politique ou littéraire française et figurent dans beaucoup de dictionnaires nationaux (Eugène Le Roy, Frédéric Mistral, Michel Aurillac et Suzanne Lacore). Il n’est pourtant pas inutile de rappeler pourquoi Verteillac les honorent.
D’autres évoquent, aux plus anciens des Verteillacois, des figures locales (Camille Merlaud, colonel Constantin, Gabriel Palus) mais ils demeurent inconnus des autres. Quant à Amédée Coudret, maire de Verteillac pendant presque un demi-siècle, plus personne ne l’a connu car il est mort en 1922…

Quoiqu’il en soit, quelques indications biographiques permettront aux habitants de Verteillac et aux visiteurs de savoir qui sont ces hommes et cette femme et de comprendre pourquoi la commune les a choisis.

Amédée COUDRET (1847-1922) :

le plus long maire de l’histoire de Verteillac

Né à Verteillac, Amédée Coudret est un propriétaire terrien, très investi dans la modernisation de l’agriculture, récompensé par plusieurs prix ou médailles lors des expositions départementales. Il a contribué à la mise en valeur agricole de l’Algérie et même aidé à établir des installations agricoles dans l’Empire ottoman. Maire de Verteillac – il est un des plus jeunes – en 1874, il le reste jusqu’à sa mort à l’exception d’une courte interruption en 1886-87. Bonapartiste, proche du ministre ribéracois Oscar Bardi de Fourtou, il devient ensuite un républicain modéré qui siège aussi au Conseil d’arrondissement de Ribérac.

Sources : Guy Penaud, « Coudret Amédée », dans Dictionnaire biographique du Périgord, Fanlac, 1999 ; Daniel Lacombe, « En Périgord vert, quelques maires des moins notables aux notables », Chronique du GRHIN, N°18, site SHAP.

Blason des Labrousse

(Photo : DR famille Charles)

Camille MERLAUD (1877-1957) :

l’artiste peintre

Né à Verteillac, Camille Merlaud est un artiste. Reconnu dès le début du XXe siècle, il se révèle pendant la Première Guerre mondiale aussi bon dessinateur que musicien et peintre. En 1927, il réalise l’affiche de la Félibrée de Périgueux. Ses œuvres sont exposées dans de grands musées en France et à l’étranger. Sa production est si abondante qu’il est impossible d’en évaluer la quantité. Il a peint la campagne verteillacoise et ses habitants et ses œuvres offrent de précieux témoignages sur la vie locale des années 1920 aux années 1950. Généreux, il offrait souvent à ses amis un dessin ou un tableau. Depuis plus d’un siècle, sa famille détient à Verteillac un commerce bien connu, passé d’une petite boutique à un magasin universel réputé où les clients trouvent tout !

Sources : Guy Penaud, « Merlaud Camille », dans Dictionnaire biographique du Périgord, Fanlac, 1999 et Bernard Lachaise, Catalogue de l’exposition Camille Merlaud, 95e Félibrée de Verteillac, 2014.

(Photo : DR famille Merlaud)

Colonel CONSTANTIN (1902-1981) :

le saint-cyrien

Né à Angoulême, petit-fils de Me Gendraud, notaire à Verteillac, Jean Constantin est élève à la prestigieuse École de Saint-Cyr. Il effectue l’essentiel de sa carrière militaire Outre-Mer : nommé sous-lieutenant d’infanterie coloniale en 1925, il a participé aux campagnes du Maroc, du Sénégal, de la Côte d’Ivoire, du Soudan, de la Tunisie et du Cambodge. Il termine sa carrière en tant que colonel après sa mission à Saïgon en tant que chef de la mission française auprès de l’armée vietnamienne. À la retraite, en 1959, il s’installe à Verteillac. Il avait épousé en 1928 la sœur d’Edgar Faure, éminente figure politique de la IVe et Ve République, président du Conseil (1952 et 1955-56), plusieurs fois ministres (notamment de l’Éducation nationale en 1968-69) et président de l’Assemblée nationale (1973-1978). 

Sources : Laurence Féral, petite-fille du colonel Constantin ; Pierre Avril (dir.), Personnel politique français 1870-1988, PUF, 1989

(Photo : DR famille Féral)

Eugène LE ROY (1836-1907) :

le romancier auteur de « Jacquou le Croquant »

Né à Hautefort, ce percepteur, très engagé du côté de la République, franc-maçon, est surtout connu comme un écrivain qui publie, grâce au soutien du sénateur périgourdin Alcide Dusolier, son premier roman Le Moulin du Frau en 1895 puis Jacquou le Croquant en 1899 – son œuvre la plus connue, adaptée pour la télévision par Stellio Lorenzi en 1969 puis au cinéma par Laurent Boutonnat en 2007 – et L’Ennemi de la mort en 1907, roman lui aussi adapté pour la télévision en 1980. Défenseur de l’occitan, Eugène Le Roy participe à la fondation du Bournat, l’École félibréenne du Périgord ». Il a si bien décrit le monde rural de son département qu’il a été qualifié de « Virgile du Périgord ».

Sources : Guy Penaud, « Le Roy Eugène », dans Dictionnaire biographique du Périgord, Fanlac, 1999 ; Francis Lacoste, Eugène Le Roy Périgourdin. Un romancier militant et sa province, Presses universitaires de Bordeaux, 1985 ; Bernard Lachaise, Alcide Dusolier (1836-1918) et la République, Éditions Secrets de pays, 2021.

(photo : DR Claude Lacombe)

Frédéric MISTRAL (1830-1914) :

l’écrivain provençal, défenseur de la langue d’oc, à l’origine du Félibrige

Né à Maillane en Provence, Frédéric Mistral se fait connaître comme poète et écrivain défenseur de la langue d’oc. Il est le fondateur, en 1854, du Félibrige, association destinée à promouvoir cette langue. Son œuvre la plus connue est Mirèio (Mireille), texte publié en provençal en 1859. Dès 1867, le critique littéraire périgourdin, Alcide Dusolier, défend Mistral accusé d’être un « patoisant ». Mais il lui écrit : « Sans dédaigner votre Provence, mon cher Mistral, cette contrée du Périgord (…) est bien la plus plaisante de France » ! En 1901, est fondée l’école félibréenne du Périgord, Lou Bornat dou Perigord et désormais, chaque année, à partir de 1903, une Félibrée – fête occitane – a lieu dans un canton du département. En 1904, Mistral reçoit le prix Nobel de littérature et Verteillac, qui a organisé deux Félibrées (1970 et 2014), lui a rendu hommage à cette dernière fête.

Sources : Wikipedia ; Bernard Lachaise, Alcide Dusolier (1836-1918) et la République, Éditions Secrets de pays, 2021.

(Photo : DR Affiche de la Félibrée de Verteillac. 2014)

Gabriel PALUS (1895-1967) :

l’érudit passionné d’histoire locale

Originaire de Bertric-Burée, autodidacte, il publia dans la presse régionale ses nombreuses recherches historiques sur la Dordogne (SHAP) dont, en 1937, une étude pionnière sur « le crime de Hautefaye ». Il a rassemblé sur chaque sujet une importante documentation, en partie conservée par la Société historique et archéologique du Périgord. Il s’était construit une maison dans sa commune natale, au bord de la route entre Verteillac et Ribérac, la « Villa Virginia ». Personnalité originale, il acheva sa vie à Verteillac au milieu de ses livres, journaux, souvenirs, hélas dispersés après son décès et pour la plupart perdus.

Source :  Bulletin de la SHAP, tome C, 1973

(Photo : Lettres d’exil de Marc Dufraisse d’après l’analyse de Gabriel Palus, SHAP, 1973)

Michel AURILLAC (1928-2017) :

le préfet, le député, le ministre

Ses racines sont ribéracoises et verteillacoises. Élève de l’ENA, Michel Aurillac exerce de hautes fonctions au service de l’État, des cabinets ministériels – Senghor, Pompidou, Messmer, Poniatowski – au Conseil d’État et comme préfet avant d’entamer une carrière politique sous l’étiquette gaulliste : député de l’Indre et ministre de la Coopération (1986-1988) dans le gouvernement Chirac. Son épouse, Martine Aurillac, est une femme politique dont le premier mandat a été celui de conseillère municipale de Verteillac (1971-1977). Elle a ensuite été élue à Paris et a exercé les fonctions de députée (1993-2012) et de maire du 7e arrondissement (1995-2002). Le couple retrouvait chaque été avec plaisir leur maison de Verteillac.

Source : Who’who ; site Assemblée nationale.

(Photo : DR Archives nationales)

Suzanne LACORE (1875-1975) :

l’institutrice socialiste devenue une des premières femmes ministres en 1936

Née en Corrèze à la limite de la Dordogne, Suzanne Lacore fait ses études à l’École normale de filles de Périgueux et exerce son métier d’institutrice à Thenon, Fossemagne et surtout Ajat (1903-1930). Militante socialiste, elle est appelée par Léon Blum lorsqu’il arrive au pouvoir en 1936 avec la victoire du Front populaire, pour participer à son gouvernement, elle qui n’est, comme toutes les Françaises à l’époque, ni électrice, ni éligible. Suzanne Lacore devient une des trois premières femmes dans un gouvernement avec Irène Joliot-Curie et Cécile Brunschvicg. Elle reçoit le portefeuille de « sous-secrétaire d’État à la protection de l’enfance ». Sa nomination suscite de vives réactions misogyne en Dordogne (ex : « « élégamment costumée en cossue périgourdine d’avant-guerre, la guerre de 1870  bien entendu » écrit Léon Sireyjol. Président du Conseil général !). Un de ses grands combats au gouvernement fut l’action en faveur de l’enfance malheureuse.

Source : Bernard Dougnac, Suzanne Lacore. Biographie 1875-1975, Fanlac-IAES, 1996 ; Bernard Lachaise, « Les femmes en politique en Dordogne au XXe siècle », Mémoire de la Dordogne, N°29, 2018.

(Photo : DR Archives départementales Dordogne)